道 德 經
DÀO DÉ JĪNG


CH01CH02CH03CH04CH05CH06CH07CH08CH09
CH10CH11CH12CH13CH14CH15CH16CH17CH18
CH19CH20CH21CH22CH23CH24CH25CH26CH27
CH28CH29CH30CH31CH32CH33CH34CH35CH36
CH37CH38CH39CH40CH41CH42CH43CH44CH45
CH46CH47CH48CH49CH50CH51CH52CH53CH54
CH55CH56CH57CH58CH59CH60CH61CH62CH63
CH64CH65CH66CH67CH68CH69CH70CH71CH72
CH73CH74CH75CH76CH77CH78CH79CH80CH81


daodejing.org/15.html

ctext.org/dictionary.pl?if=en&id=11606

tao-te-king.org/15.htm

daoisopen.com/downloads/CC15.pdf

daoisopen.com/downloads/About the Charts.pdf

laozirecited.com/#15

nouveautestament.github.io/DAODEJING/index.html

github.com/nouveautestament/DAODEJING



WB------------------------------------------
HSG--------------------------------------------
FY------------------------------------------
MWDA------<----<--------椿<--------<--------------
MWDB----------------------椿----------------------------------
GD--------------------------------------------_----------------------------
YDDJ----------------------------------


zhī shàn wéi shì zhěwēi miào xuán tōngshēn shí wéi shí qiáng wéi zhī róng ruò dōng shè chuānyóu ruò wèi línyǎn ruò rónghuàn ruò bīng zhī jiāng shìdūn ruò kuàng ruò hùn ruò zhuóshú néng zhuó jìng zhī qīngshú néng ān jiǔ dòng zhī shēngbǎo dào zhě yíng wéi yíng néng xīn chéng
vieux classique, ancien-#P #W #C #Z
zhīde de provenant, ça aller à#P #W #C #Z
shànbon vertueux, charitable, gentil-#P #W #C #Z
wéifaire gérer, gouverner, agir  être#P #W #C #Z
shìérudit gentleman soldat#P #W #C #Z
zhěce qui celui qui ceux qui#P #W #C #Z
wēipetit préfixe micro-, insignifiant-#P #W #C #Z
miàomystérieux subtil exquis#P #W #C #Z
xuánprofond profond, abstrus-#P #W #C #Z
tōngpasser commun, communiquer-#P #W #C #Z
shēnprofond profondeur loin; très, extrême#P #W #C #Z
ne-pas non préfixe négatif#P #W #C #Z
peut capable peut-être#P #W #C #Z
shíreconnaître savoir, comprendre-#P #W #C #Z
homme adulte de sexe masculin, mari  ceci, celui#P #W #C #Z
wéiseulement simplement, justement, souhait oui#P #W #C #Z
ne-pas non préfixe négatif#P #W #C #Z
peut capable peut-être#P #W #C #Z
shíreconnaître savoir, comprendre-#P #W #C #Z
ancien vieux raison-de, parce-que, car, en-effet; mourir#P #W #C #Z
qiángfort puissant, énergique-#P #W #C #Z
wéifaire gérer, gouverner, agir  être#P #W #C #Z
zhīde de provenant, ça aller à#P #W #C #Z
róngapparence apparence  figure, forme#P #W #C #Z
détendu confortable, à l'aise-#P #W #C #Z
particule exclamative !, Ô-#P #W #C #Z
ruòsemble si, en supposant similaire#P #W #C #Z
dōnghiver 11ème mois lunaire-#P #W #C #Z
shèFord Stream traversez-le à gué-#P #W #C #Z
chuānruisseau rivière couler; bouillir#P #W #C #Z
yóucomme semblable à, tout comme, comme-#P #W #C #Z
particule exclamative !, Ô-#P #W #C #Z
ruòsemble si, en supposant similaire#P #W #C #Z
wèipeur effroi, respect, révérence-#P #W #C #Z
Quatre--#P #W #C #Z
línvoisin quartier-#P #W #C #Z
yǎngrave respectueux, majestueux-#P #W #C #Z
particule exclamative !, Ô-#P #W #C #Z
le sien elle, son, leur  que#P #W #C #Z
ruòsemble si, en supposant similaire#P #W #C #Z
róngapparence apparence  figure, forme#P #W #C #Z
huàndispersion dispersé, dispersé-#P #W #C #Z
particule exclamative !, Ô-#P #W #C #Z
ruòsemble si, en supposant similaire#P #W #C #Z
bīngglace glacé-#P #W #C #Z
zhīde de provenant, ça aller à#P #W #C #Z
jiāngvolonté aller, futur général#P #W #C #Z
shìinterpréter élucider libérer#P #W #C #Z
dūnestime honnête, franc, sincère-#P #W #C #Z
particule exclamative !, Ô-#P #W #C #Z
le sien elle, son, leur  que#P #W #C #Z
ruòsemble si, en supposant similaire#P #W #C #Z
simple honnête plaine; rugueux#P #W #C #Z
kuàngétendu large, large vide#P #W #C #Z
particule exclamative !, Ô-#P #W #C #Z
le sien elle, son, leur  que#P #W #C #Z
ruòsemble si, en supposant similaire#P #W #C #Z
vallée gorge, ravin-#P #W #C #Z
hùnmélanger mélanger, mélanger se bousculer#P #W #C #Z
particule exclamative !, Ô-#P #W #C #Z
le sien elle, son, leur  que#P #W #C #Z
ruòsemble si, en supposant similaire#P #W #C #Z
zhuóboueux trouble, sale, crasseux-#P #W #C #Z
shúOMS? lequel? quoi ? lequel?--#P #W #C #Z
néngpouvoir peut, autorisé à capacité#P #W #C #Z
zhuóboueux trouble, sale, crasseux-#P #W #C #Z
au moyen de par conséquent, donc  considérer comme; pour#P #W #C #Z
jìngcalme immobile, immobile doux#P #W #C #Z
zhīde de provenant, ça aller à#P #W #C #Z
lentement doucement, calmement calme, digne#P #W #C #Z
qīngclair pur, propre pacifique#P #W #C #Z
shúOMS? lequel? quoi ? lequel?--#P #W #C #Z
néngpouvoir peut, autorisé à capacité#P #W #C #Z
ānpaisible tranquille, tranquille-#P #W #C #Z
au moyen de par conséquent, donc  considérer comme; pour#P #W #C #Z
jiǔlongtemps durée de temps retard#P #W #C #Z
dòngbouger arriver mouvement, action#P #W #C #Z
zhīde de provenant, ça aller à#P #W #C #Z
lentement doucement, calmement calme, digne#P #W #C #Z
shēngla vie la vie, la vie naissance#P #W #C #Z
bǎoprotéger sauvegarder, défendre, soigner-#P #W #C #Z
ceci ceux-là  dans ce cas, alors#P #W #C #Z
dàoVoie chemin, route, rue, conduite méthode, manière ; raconter#P #W #C #Z
zhěce qui celui qui ceux qui#P #W #C #Z
ne-pas non préfixe négatif#P #W #C #Z
désirer vouloir, désirer avoir l'intention#P #W #C #Z
yíngremplir plein, débordant surplus#P #W #C #Z
homme adulte de sexe masculin, mari  ceci, celui#P #W #C #Z
wéiseulement simplement, justement, souhait oui#P #W #C #Z
ne-pas non préfixe négatif#P #W #C #Z
yíngremplir plein, débordant surplus#P #W #C #Z
ancien vieux raison-de, parce-que, car, en-effet; mourir#P #W #C #Z
néngpouvoir peut, autorisé à capacité#P #W #C #Z
couvrir cacher, dissimuler abri#P #W #C #Z
ne-pas non préfixe négatif#P #W #C #Z
xīnnouveau récent, frais, moderne-#P #W #C #Z
chéngterminé fini, accomplir réparé#P #W #C #Z
STEPHEN MITCHELL TRADFR 1988 CHAPITRE 15

Les anciens Maîtres étaient profonds et subtils.

Leur sagesse était insondable.

Il n’y a aucun moyen de la décrire ;

tout ce que nous pouvons décrire, c’est leur apparence.

Ils étaient prudents

comme quelqu'un qui traverse un ruisseau gelé.

Alertes comme un guerrier en territoire ennemi.

Courtois comme un invité.

Fluides comme la glace fondante.

Façonnables comme un bloc de bois.

Réceptifs comme une vallée.

Clairs comme un verre d'eau.

Avez-vous la patience d'attendre

que la boue se dépose et que l'eau soit claire ?

Pouvez-vous rester immobile

jusqu'à ce que la bonne action apparaisse d'elle-même ?

Le Maître ne cherche pas l'accomplissement.

Ne cherchant pas, n'attendant rien,

il est présent et peut accueillir toutes choses.

JULIEN STANISLAS 1842 CHAPITRE XV

Dans l’antiquité, ceux qui excellaient à pratiquer le Tao (1) étaient déliés et subtils, abstraits et pénétrants.

Ils étaient tellement profonds qu’on ne pouvait les connaître.

Comme on ne pouvait les connaître, je m’efforcerai de donner une idée (de ce qu’ils étaient). Ils étaient timides comme celui qui traverse un torrent en hiver (2).

Ils étaient irrésolus comme celui qui craint d’être aperçu de ses voisins (3).

Ils étaient graves (4) comme un étranger (en présence de l’hôte).

Ils s’effaçaient comme la glace qui se fond (5).

Ils étaient rudes (6) comme le bois non-travaillé.

Ils étaient vides (7) comme une vallée.

Ils étaient troubles (8) comme une eau limoneuse (9).

Qui est-ce qui sait apaiser peu à peu (10) le trouble (de son cœur) en le laissant reposer ?

Qui est-ce qui sait naître peu à peu (à la vie spirituelle) par un calme prolongé (11) ?

Celui qui conserve ce Tao ne désire pas d’être plein (12).

Il n’est pas plein (de lui-même), c’est pourquoi il garde ses défauts (apparents), et ne désire pas (d’être jugé) parfait.


NOTES

(1) B : Ceux qui cultivent aujourd’hui le Tao se montrent au grand jour, et ne craignent rien tant que d’être inconnus des hommes. Mais, dans l’antiquité, ceux qui cultivaient le Tao (c’est le sens que Ifouen-tse donne ici au mot sse ) agissaient tout autrement. Ils (E) s’identifiaient avec le Tao, c’est pourquoi ils étaient déliés et subtils, abstraits et pénétrants. Ils étaient tellement profonds qu’on ne pouvait les connaître ; comme on ne pouvait les connaître, il serait impossible de les dépeindre fidèlement. Je m’efforcerai de donner seulement une idée approximative de ce qu’ils paraissaient être.


(2) C : Ils se décidaient difficilement à entreprendre quelque chose, de même qu’en hiver on se décide difficilement à traverser un torrent.


(3) E : Ils étaient attentifs, se tenaient sur leurs gardes, et (C) n’osaient rien faire de mal.


(4) H : Ils étaient humbles, réservés, et n’osaient se mettre en avant.


(5) Youen-tse : Lorsque l’homme commence à naître, il ressemble à un grand vide ; bientôt son être se condense et prend un corps,de même que l’eau devient glace. C’est pourquoi celui qui pratique le Tao se dégage de son corps pour reprendre son essence primitive,comme la glace se fond pour redevenir eau.


(6) E : Le mot tun veut dire ici « ce qui est entier, » c’est-à-dire (ibid.) « ce qui est dans son état naturel, ce qui est simple,sans ornement, sans élégance. » (Ils avaient leur simplicité native.)


(7) E : Ils étaient vides et dépouillés de tout (littér. « ils ne renfermaient rien). »


(8) E : Ils paraissaient entourés de ténèbres et privés de discernement.


(9) E : Le mot tcho veut dire qu’ils paraissent « ignorants,stupides. » B : Ils se confondaient avec le siècle et s’abaissaient au niveau de sa poussière ; leurs actions ne paraissaient point différer de celles des autres hommes.

C : Ils recevaient sans se plaindre les opprobres et les souillures du monde.


(10) E : Plus haut, le mot tcho , « trouble, » s’appliquait au sage qui paraît ignorant et stupide. Mais ici il se dit du cœur de la multitude qui est rempli de trouble et de désordre. L’eau qui est trouble peut s’épurer ; mais si on ne la laisse pas reposer et qu’on la trouble sans cesse, elle ne pourra jamais devenir pure. E : L’expression cho-neng 孰能, « qui est-ce qui peut ? » sert à exhorter les hommes.


(11) E : Si l’on puise souvent de l’eau dans un puits, il ne manque pas de se troubler. Si un arbre est souvent transplanté, il ne manque pas de périr. Il en est de même de la nature et des affections de l’homme. Si nous déracinons nos affections, si nous réprimons nos pensées, alors les souillures et le trouble disparaîtront, et un éclat céleste viendra briller en nous. Si nous concentrons en nous-mêmes notre faculté de voir et d’entendre, alors nos esprits se calmeront,et nous naîtrons à la vie spirituelle. Si l’homme peut agir ainsi, de grossier qu’il était, il deviendra délié et subtil, et il ressemblera aux sages qui possédaient le Tao dans l’antiquité.

Aliter B : Qui est-ce qui peut calmer ses pensées longtemps agitées et les ramener peu à peu à leur état primitif ?


(12) E : Celui qui conserve ce Tao ne veut pas être plein. (Nous avons vu, dans le chapitre iv, que pou-ing 不盈 signifie « vide. »Il aime à être vide.) En effet, ce qui est plein ne peut durer longtemps (ne tarde pas à déborder). C’est ce que déteste le Tao (il aime à être vide). Le sage estime ce qui est usé, défectueux (au fig. c’est-à-dire aime à paraître rempli de défauts) ; les hommes du siècle estiment au contraire ce qui est neuf, nouvellement fait. Il ne veut pas être plein, c’est pourquoi il peut conserver ce qu’il a d’usé, de défectueux (en apparence), et ne désire pas d’être (brillant) comme une chose nouvellement faite. B : Le saint homme se dépouille de tout ce qu’il avait au dedans de lui, il n’y laisse pas une seule chose qui puisse le rattacher au monde matériel. C’est pourquoi le saint homme (cf. chap. lxx) se revêt d’habits grossiers et cache des perles dans son sein. Au dehors il ressemble à un homme en démence ; il est comme un objet usé ; il n’a rien de l’éclat, de l’élégance par lesquels les choses neuves (littér. « nouvellement faites ») attirent les regards de la foule.

Ce passage veut dire que le sage aime mieux paraître rempli de défauts et d’imperfections que de briller par des avantages extérieurs. Par là il conserve le mérite qu’il possède au dedans de lui.


CONRADIN VON LAUER 1990 CHAPITRE 15

Les grands sages de l'Antiquité
étaient si éloignés
des autres hommes
par l'étendue de leur connaissance
et la profondeur de leur pensée
qu'on ne pouvait
espérer les comprendre.
Peut-on les décrire ?
Ils étaient attentifs
comme l'homme qui traverse
l'eau tumultueuse et glacée
d'un torrent.
Prudents
comme le voyageur
averti d'un danger.
Réservés
comme le visiteur
qui reçoit l'hospitalité.
Insaisissables
comme la glace
qui font.
Simples
comme le bois brut
que l'on vient de débiter.
Ils étaient emplis d'espace infini
comme la vallée.
Insondables
comme une eau dormante.
Celui qui suit le Tao peut,
sans trouble intérieur,
attendre que l'eau pure
se décharge des limons.
Immobile et calme,
il verra se présenter
l'heure d'agir.
Il ne désire
que l'infini du vide.
C'est pourquoi
les hommes peuvent par moment
le mépriser,
le croyant loin de la vérité,
car ils ignorent sa sagesse.


MA KOU 1984 CHAPITRE 15

En union subtile avec les forces invisibles
Les sages de l’antiquité
Etaient si mystérieusement profonds
Qu’on ne pouvait les connaître
Et à peine les décrire.

Hésitants comme qui passe une rivière en hiver
Prudents comme celui qui craint l’environnement
Dignes comme un hôte
Muables comme la glace qui peut fondre
Simples comme un bois non taillé
Creux comme la vallée
Obscurs comme de l’eau opaque

Ils savaient passer
Doucement dans l’immobilité
Et du trouble à la clarté.
Puis par le mouvement du calme à l’action.

Préservant leurs expériences
Ils ne désiraient pas être remplis
Et n’étant jamais emplis
Ils savaient être usés
Et pourtant toujours se renouveler.

ALBERT DE POUVOURVILLE 1999 CHAPITRE 15

Les sages parfaits de l'Antiquité étaient insaisissables, surnaturels, mystérieux, pénétrants, si profonds qu'on ne pouvait les connaître. Comme on ne pouvait les connaître on ne peut tenter de les dépeindre.
Ils étaient attentifs! comme celui qui traverse un cours d'eau en hiver; prudents! comme celui qui craint ses voisins; réservés! comme celui qui
reçoit l'hospitalité; effacés! comme la glace fondante; vides! comme la vallée; troubles! comme l'eau limoneuse.
Qui peut, par le calme, clarifier peu à peu ce qui est impur? Qui peut, peu à peu, naître au calme et s'y maintenir toujours? Celui qui garde le Tao. Il ne désir pas être plein, mais vide. C'est pourquoi il peut paraître méprisable et dépourvu de perfection temporelle.
LEON WIEGER 1913 CHAPITRE 15

Les Sages de l’antiquité, étaient subtils, abstraits, profonds, à un degré que les paroles ne peuvent exprimer. Aussi vais-je me servir de comparaisons imagées, pour me faire comprendre vaille que vaille.
Ils étaient circonspects comme celui qui traverse un cours d’eau sur la glace ; prudents comme celui qui sait que ses voisins ont les yeux sur lui ; réser­vés comme un convive devant son hôte. Ils étaient indifférents comme la glace fondante (qui est glace ou eau, qui n’est ni glace ni eau). Ils étaient rus­tiques comme le tronc (dont la rude écorce cache le cœur excellent). Ils étaient vides comme la vallée (par rapport aux montagnes qui la forment). Ils étaient accommodants comme l’eau limoneuse, (eux, l’eau claire, ne repoussant pas la boue, ne refusant pas de vivre en contact avec le vulgaire, ne faisant pas bande à part).
(Chercher la pureté et la paix dans la sépara­tion d’avec le monde, c’est exagération. Elles peu­vent s’obtenir dans le monde.) La pureté s’obtient dans le trouble (de ce monde), par le calme (inté­rieur), à condition qu’on ne se chagrine pas de l’impureté du monde. La paix s’obtient dans le mou­vement (de ce monde), par celui qui sait prendre son parti de ce mouvement, et qui ne s’énerve pas à désirer qu’il s’arrête.
Celui qui garde cette règle de ne pas se consu­mer en désirs stériles d’un état chimérique, celui-là vivra volontiers dans l’obscurité, et ne prétendra pas à renouveler le monde.
Tchang-houngyang explique ainsi le dernier paragraphe D, assez obscur, à cause de son ex­trême concision : Celui-là restera fidèle aux en­seignements des anciens, et ne se laissera pas sé­duire par des doctrines nouvelles. Cette expli­cation paraît difficilement soutenable.
OLIVIER NYSSEN 2022 CHAPITRE 15

Dans le passé, on traitait bien celui qui est sur la voie,

celui qui traverse ce qui est caché, subtil, obscur,

si profond qu'on ne peut le reconnaître.

On ne peut reconnaître l'époux qui est seul,

ainsi il a l'air d'agir avec force.

Avant, ici, c'était comme patauger dans une rivière en hiver,

comme par crainte de ses quatre voisins¹.

Il est solennel comme un visiteur,

il se dilate comme la glace, ce qui défie les explications,

il est honnête comme un simple²,

il est vaste comme la vallée,

il dérive comme la boue.

Qui peut être boueux pour devenir lentement limpide en s'arrêtant, immobile ?

Qui peut être calme pour grandir lentement en se déplaçant longtemps ?

Protégez celui qui est sur la voie, qu'il ne soit pas plein de désirs.

L'époux qui est seul n'est pas plein de désirs,

ainsi il peut s'abriter mais pas devenir neuf.

1. pays voisins

2. Pu signifie également tronc d'arbre abattu, ébranché et recouvert de son écorce; matière première; brut, grossier, naturel.

JAN DUYVENDAK 1949 CHAPITRE 15

Ceux qui, dans l’antiquité, étaient habiles dans la Voie,

avaient (une nature) subtile et merveilleuse et une pénétration

mystérieuse, si profondes qu’on ne peut les

connaître. Puisque, en effet, on ne peut les connaître, on

peut seulement s’efforcer à décrire leurs attitudes.

Qu’ils étaient hésitants, comme quelqu’un qui passe à gué

une rivière en hiver !

Qu’ils étaient circonspects, comme quelqu’un qui craint

ses voisins tout alentour !

Qu’ils étaient réservés, comme un invité (en présence de

l’hôte) !

Qu’ils étaient fondants, comme la glace qui va dégeler !

Qu’ils étaient solides, comme le bois brut !

Qu’ils étaient larges, comme une vallée !

Qu’ils étaient turbides, comme l’eau trouble !

Qu’est ce qui peut faire cesser la turbidité ? Par la tranquillité

(l’eau trouble) peu à peu devient claire.

Qu’est ce qui peut assurer le repos ? Par le mouvement

peu à peu (le repos) se produit.

Ceux qui conservaient cette Voie ne désiraient pas être

remplis.

En effet, puisqu’ils n’étaient pas remplis, ils pouvaient

s’user sans être renouvelés.

***

Il y a quelques variantes peu importantes. La première phrase se retrouve

au début de LXVI, ce qui est un argument pour la leçon tao (1)

au lieu de che (53) « maître » du texte traditionnel.

Pour la signification de k’iang (54.) « s’efforcer à », voir XXV : « Essayant

autant que possible de la définir ». Les deux mots traduits par

« hésitants » et « circonspects », yu et yeou (55), se trouvent souvent

comme binôme dans un ordre inverse.

Dans la phrase « comme un invité », Wang Pi a une faute évidente

: jong (56) pour k’o (57) qui lui ressemble beaucoup par la forme ;

la leçon k’o est confirmée par la rime. Plus loin, je suis la leçon qui

insère tche (58) « faire cesser », rimant avec kieou (20) « longtemps

», rendu ici par « assurer ».

Le commentaire de Wang Pi laisse soupçonner que peut être, entre

les phrases sur la manière de faire cesser la turbidité et d’assurer

le repos, il y avait une phrase comme : « Qu’est ce qui peut mettre

l’ordre dans l’obscurité ? Par le... ( ?) elle peut devenir claire. »

Le texte décrit le Taoïste idéal dans ses « attitudes » jong (56), voir

XXI. Il s’abstient de se faire valoir et, par suite, il est « hésitant », « circonspect

», « réservé », « fondant », le contraire de l’homme d’action

ferme et pratique. Mais il n’y a rien d’artificiel en lui : il est « solide »,

c’est à dire authentique, comme le bois brut, et il est large et compré

hensif dans ses idées. Quoique cette compréhension lui donne une

apparence de « turbidité », il sait par le repos de son inaction changer

cet état trouble en clarté, tandis que son action même se termine

toujours en repos. Un tel Taoïste n’aime pas la condition pleine, c’est

à dire ne fait aucun effort pour maintenir l’état du plus haut développement

; mais il laisse opérer en lui-même la loi du changement

constant, qui implique amoindrissement. Il s’use, comme un vêtement,

sans tâcher d’empêcher cette opération par la réparation ou le

renouvellement.